Le Burundi ferme le stade de Rugombo, principal site d’accueil des réfugiés congolais
Face à l’afflux massif de réfugiés fuyant les violences à l’est de la RDC, le gouvernement burundais a fermé le stade de Rugombo, qui abritait plus de 45 000 personnes. Cette décision, motivée par des raisons logistiques et sécuritaires, suscite de vives critiques, notamment en raison des conditions précaires dans les nouveaux camps de relocalisation.

RUGOMBO – Le gouvernement burundais a récemment procédé à la fermeture du site de transit de Rugombo, un stade devenu le principal point d’accueil pour des milliers de réfugiés congolais fuyant les combats dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC). Cette mesure, entrée en vigueur le samedi 5 avril, suscite autant de préoccupations que de critiques sur le plan humanitaire.
Un refuge devenu invivable
Depuis plusieurs mois, le stade de Rugombo, situé dans la province de Cibitoke, à proximité de la frontière congolaise, servait de lieu de regroupement temporaire pour les Congolais cherchant à échapper aux affrontements opposant l’armée congolaise au mouvement rebelle M23. D’après les estimations du Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR), ce sont plus de 45 000 personnes qui y avaient trouvé refuge, dans des conditions de plus en plus précaires.

L’afflux de réfugiés depuis le début de l’année, évalué à près de 70 000 individus, a représenté le plus grand déplacement de population vers le Burundi depuis plusieurs décennies. Cet exode massif est en grande partie provoqué par la reprise des hostilités dans le Nord-Kivu, où le M23 – accusé d’être soutenu par le Rwanda – a consolidé son emprise sur plusieurs localités.
Une décision critiquée
La fermeture du stade de Rugombo n’a pas été sans heurts. Selon plusieurs témoignages, les autorités burundaises ont mobilisé un important dispositif de sécurité pour évacuer le site.
« Un véhicule sillonnait les rues, sommant les réfugiés de se rendre au camp de Rutana, sous peine d’être traités comme des rebelles s’ils restaient », a confié un réfugié à l’AFP.
Certains réfugiés dénoncent des relocalisations forcées et un manque criant de soutien dans les nouveaux camps. Plusieurs familles auraient préféré rester à Rugombo, malgré les conditions insalubres, par crainte de mauvais traitements ailleurs.
« On nous a dit que ceux qui ont été transférés à Rutana n’ont reçu ni nourriture ni soins », affirme un autre témoin.
Enjeux logistiques et pression humanitaire
Du côté des autorités burundaises, la fermeture du site est justifiée par la nécessité d’éviter une saturation dangereuse et de sécuriser la frontière.
« Il était devenu impossible de gérer autant de personnes dans un espace aussi restreint », a déclaré un responsable administratif local.
Il évoque également les risques liés à la proximité avec la RDC, théâtre d’un conflit qui menace de s’étendre.
Mais cette décision intervient alors même que les ressources humanitaires sont sous tension. Le Programme alimentaire mondial (PAM) a récemment alerté sur la situation, soulignant que près de 120 000 personnes avaient désormais besoin d’assistance alimentaire au Burundi. Faute de moyens suffisants, l’organisation a dû réduire les rations distribuées aux réfugiés de moitié.
Une crise régionale en escalade
La fermeture du stade de Rugombo met en lumière les limites de la capacité d’accueil du Burundi, l’un des pays les plus pauvres du continent. Elle reflète aussi l’aggravation d’une crise régionale dont les répercussions débordent les frontières de la RDC. Alors que les combats se poursuivent à l’est du pays, la pression migratoire pourrait encore s’intensifier dans les semaines à venir, mettant davantage à l’épreuve les pays voisins.
Les ONG appellent aujourd’hui à une action coordonnée entre les États de la région, les agences humanitaires et la communauté internationale afin de répondre de manière urgente et efficace aux besoins des populations déplacées. Pour l’instant, les réfugiés congolais déplacés à la hâte vers d’autres camps burundais restent dans l’incertitude, entre insécurité et manque de moyens.