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L’inaction de l’Union africaine face à la crise dans l’est de la RDC

L’Union africaine peine à gérer la crise dans l’est de la RDC, où les rebelles du M23, soutenus par le Rwanda, continuent leur avancée. Lors de son sommet à Addis-Abeba, l’organisation n’a ni sanctionné ni condamné Kigali, malgré les demandes de Kinshasa. Les tensions étaient vives entre les chefs d’État, et la médiation reste floue, avec une fusion annoncée des processus de paix de Luanda et de Nairobi, mais sans plan concret. Pendant ce temps, la RDC salue l’échec du Rwanda à obtenir un siège au Conseil paix et sécurité de l’UA, un revers diplomatique pour Paul Kagame.

Alors que les combattants de l’AFC/M23, appuyés par l’armée rwandaise, ont pris position à Bukavu ce week-end, les dirigeants de l’Union africaine se retrouvaient à Addis-Abeba pour leur sommet annuel. La question du conflit entre la RDC et le Rwanda a suscité de vifs débats vendredi soir, mais à la clôture des discussions dimanche, aucune sanction ni condamnation explicite du Rwanda n’a été prononcée, contrairement aux attentes de Kinshasa. De plus, aucune mesure concrète n’a été annoncée pour tenter d’apaiser les tensions. Cette situation met en lumière un malaise persistant au sein de l’organisation continentale face à cette guerre qui divise ses membres.

Le Burundi s’est retrouvé isolé dans sa tentative de faire condamner Kigali par l’UA. Dimanche 16 février, lors de la session finale, le pays a plaidé pour une prise de position ferme contre le Rwanda, mais son appel est resté lettre morte. « Personne n’a réagi », confie un participant, témoignant du silence pesant dans la salle. Même en coulisses, la plupart des chefs d’État ont soigneusement évité d’aborder frontalement le sujet. Interrogé sur la situation, le leader kényan Raila Odinga s’est contenté d’un laconique : « Je ne veux pas en parler ».

La réunion du Conseil paix et sécurité, organisée vendredi autour de cette crise, a été particulièrement tendue. La RDC a réclamé des sanctions contre Kigali, accusé de violer la souveraineté congolaise en soutenant les rebelles du M23. Le président Paul Kagame, visiblement irrité, a rejeté en bloc ces accusations, affirmant que la responsabilité du conflit incombait uniquement à Kinshasa. Le climat était si électrique que la conférence de presse prévue après la réunion a été annulée, et 48 heures plus tard, aucun communiqué final n’avait encore été publié.

Face à cette impasse, le commissaire de l’UA en charge de la paix et de la sécurité, Bankolé Adeoyé, a finalement pris la parole dans l’après-midi. Il a exhorté le M23 et ses alliés à se retirer immédiatement des territoires congolais occupés, sans toutefois mentionner explicitement le rôle du Rwanda. Il a également insisté sur l’urgence d’un dialogue inclusif pour parvenir à une solution durable. Malgré l’absence de condamnation officielle, Kinshasa se réjouit d’un revers diplomatique infligé à Kigali : le Rwanda n’a pas obtenu le siège qu’il convoitait au sein du Conseil paix et sécurité de l’UA. Certains analystes y voient une forme de sanction implicite, même si d’autres facteurs ont pu peser sur ce vote.

Une médiation en suspens

Alors que certains réclament des sanctions, d’autres estiment qu’elles ne sont pas la meilleure solution. « Punir un pays n’a jamais suffi à régler un conflit », a déclaré le président congolais Denis Sassou Nguesso au micro de France 24. « Ce qui compte, c’est de trouver une issue viable et durable ».

Sur le plan diplomatique, une avancée a néanmoins été enregistrée : les chefs d’État ont donné leur accord de principe pour fusionner les processus de médiation de Luanda et de Nairobi. L’objectif est d’éviter les interférences et de coordonner les efforts de paix, mais aucune feuille de route claire n’a encore été définie.

Un autre point reste en suspens : l’avenir des médiateurs actuels. Le Kényan Uhuru Kenyatta et l’Angolais João Lourenço, ce dernier assurant désormais la présidence tournante de l’UA, jouent un rôle clé dans la gestion de la crise. Cependant, Kigali voit d’un mauvais œil leur implication, estimant que leurs positions sont trop alignées sur celles de Kinshasa. L’incertitude demeure quant à leur maintien dans le processus de médiation, et plus largement, quant à la capacité de l’UA à peser réellement sur l’issue du conflit.

Henry Fiti

Journaliste et développeur congolais, fondateur de Congonet 24. Passionné par l’information et la technologie, je m’engage à offrir une actualité fiable et accessible.

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