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RDC – Tricherie à l’Examen d’État : un phénomène organisé dès le début de l’année scolaire

Derrière le rôle officiel des chefs de promotion se cache parfois une structure de fraude bien établie. Téléphones miniatures, mercenaires, complicité de surveillants… Une observation sur le terrain révèle l’ampleur d’un phénomène qui menace la crédibilité du diplôme congolais.

Kinshasa, 31 juillet 2025 – Congonet24.com

Dans plusieurs établissements scolaires de la République Démocratique du Congo, une pratique inquiétante semble s’enraciner en silence : l’organisation précoce de la tricherie aux épreuves de l’Examen d’État. Ce phénomène, loin d’être marginal, se met en place dès les premiers jours de la rentrée scolaire, sous une forme structurée et parfois même tolérée.

©️ Nathanael Milambo

Tout commence par l’élection d’un chef de promotion (CP), un élève désigné par ses pairs pour coordonner les activités de la classe. À l’origine, ce rôle devrait favoriser l’unité des finalistes, organiser les travaux collectifs, assurer la gestion des cotisations et encourager une bonne préparation aux examens. Mais dans la réalité, cette fonction est souvent détournée à d’autres fins.

En collaboration avec son comité, le CP met en place un système parallèle : cours particuliers dispensés par des « mercenaires », anciens étudiants ou enseignants, qui vont au-delà du simple encadrement académique. Ces derniers, selon plusieurs témoignages, disposent d’un accès anticipé à certains items de l’Examen d’État, sans que l’on sache clairement comment ces documents confidentiels parviennent entre leurs mains.

©️ Nathanael Milambo

Pendant les épreuves officielles, ces réseaux s’activent. Des téléphones portables miniatures sont introduits dans les salles, souvent dissimulés dans les vêtements ou les trousses. Les réponses sont ensuite transmises aux élèves via des messages SMS, à l’abri des regards.Plus préoccupant encore, certaines sources font état de la complicité de surveillants, qui, en échange de sommes d’argent versées par les élèves ou leurs parents, ferment les yeux sur ces pratiques illicites. Dans certains cas, ils faciliteraient même l’entrée des dispositifs de communication dans les centres d’examen.Ce phénomène met en lumière les failles structurelles du système éducatif congolais. La tricherie, désormais institutionnalisée dans certains milieux, compromet la crédibilité des diplômes délivrés et creuse un écart grandissant entre les élèves méritants et ceux qui misent sur la fraude.

Alors que le ministère de l’Éducation multiplie les efforts de réforme et tente d’introduire des innovations comme la correction numérique assistée par intelligence artificielle, il devient urgent de restaurer l’intégrité du processus d’évaluation. La lutte contre la fraude à l’Examen d’État ne peut réussir sans une implication ferme de toutes les parties prenantes : autorités, enseignants, parents et élèves eux-mêmes.

Observation de terrain – Henry Fiti

Henry Fiti

Présent sur le terrain durant les quatre jours d’épreuves de l’Examen d’État, j’ai personnellement constaté, en tant qu’observateur indépendant, la réalité de ce système de tricherie structuré. Dans plusieurs centres, des élèves ont utilisé des téléphones dissimulés pour communiquer discrètement pendant les examens, tandis que des surveillants semblaient délibérément détourner le regard.

Cette observation directe confirme les nombreux témoignages recueillis ces dernières années et révèle l’ampleur du phénomène. Il ne s’agit plus d’actes isolés, mais d’un mode opératoire collectif et organisé, toléré, voire encouragé dans certains cas.

Une réflexion nationale s’impose pour redonner du sens à l’Examen d’État, et surtout, pour préserver la valeur du diplôme congolais.

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