RDC : en pleine tempête politique, la justice congolaise sous les projecteurs
La République Démocratique du Congo traverse une période de turbulences politiques et judiciaires, marquée par des accusations croisées de détournement de fonds entre hauts responsables, des mises à la retraite stratégiques, et des tensions croissantes au sein du système judiciaire.

Kinshasa – Une série d’événements récents secoue les hautes sphères de la République Démocratique du Congo, mettant en lumière les tensions croissantes au sein du pouvoir judiciaire et exécutif. Un climat d’incertitude s’installe, alimenté par des révélations successives impliquant d’importantes figures politiques et institutionnelles.
La justice congolaise se retrouve une fois de plus au centre de l’actualité. Après l’examen parlementaire de l’immunité de l’ancien président Joseph Kabila, et la condamnation judiciaire de son ancien Premier ministre, Augustin Matata Ponyo, pour détournement de fonds, c’est désormais le ministre de la Justice, Constant Mutamba, qui fait l’objet d’une procédure judiciaire.
En novembre 2024, le ministre Mutamba avait suscité l’attention en ordonnant l’ouverture d’une enquête sur l’acquisition d’un bien immobilier de luxe à Bruxelles, d’une valeur avoisinant 900 000 euros, par le procureur général près la Cour de cassation, Firmin Mvonde. Cette initiative, perçue par certains comme un acte de transparence, avait également soulevé des interrogations sur ses motivations réelles.

Six mois plus tard, dans un retournement de situation spectaculaire, le procureur Mvonde lance à son tour des poursuites contre Mutamba, cette fois pour des faits présumés de détournement de fonds publics. Ce bras de fer entre deux hauts responsables illustre les tensions palpables qui traversent les institutions judiciaires du pays et alimente le débat sur la crédibilité et l’indépendance des enquêtes en cours.
Dans ce climat tendu, le président Félix Tshisekedi a signé, le 7 mai dernier, la mise à la retraite de Jules Alingete Key, Inspecteur Général des Finances (IGF), figure emblématique du contrôle des finances publiques depuis plusieurs années. Cette décision intervient peu après les déclarations médiatiques de l’ancien ministre des Finances, Nicolas Kazadi, qui a dénoncé une “machination” dirigée contre lui par l’IGF. La succession de ces événements semble dessiner une recomposition silencieuse des équilibres internes au sein du pouvoir.
Ces multiples rebondissements, parfois perçus comme des règlements de comptes entre figures d’influence, interpellent une population de plus en plus attentive aux enjeux de gouvernance, de justice et de redevabilité. Dans ce contexte, plusieurs analystes appellent à une réforme en profondeur du système judiciaire afin de garantir son indépendance face aux intérêts politiques.
Alors que les accusations s’entrecroisent et que les mandats tombent, une question reste en suspens : la justice congolaise pourra-t-elle sortir renforcée de cette série de secousses, ou risque-t-elle d’en sortir davantage fragilisée ? La réponse dépendra autant des institutions que de la volonté politique de restaurer la confiance du public dans l’État de droit.