Gestion des droits d’auteur en RDC : la SOCODA au cœur d’un système à bout de souffle
La SOCODA, censée protéger les droits d’auteur en RDC, est accusée d’inefficacité et de mauvaise gestion. Artistes et intellectuels dénoncent un système défaillant, réclamant une réforme profonde pour assurer une juste rétribution des créateurs culturels.

La gestion des droits d’auteur en République démocratique du Congo continue de soulever de nombreuses interrogations. Entre dénonciations publiques, manque de transparence et dysfonctionnements internes, la Société congolaise des droits d’auteur et des droits voisins (SOCODA) semble être devenue, aux yeux de nombreux artistes, un obstacle au développement durable de l’industrie culturelle congolaise.
Depuis plusieurs années, les critiques fusent contre cette institution censée protéger les intérêts des créateurs. Malgré certaines initiatives de redressement, la confiance semble rompue. De nombreux artistes, musiciens et comédiens dénoncent une structure inefficace, minée par des pratiques contestées et une gestion jugée défaillante.
En 2024, des voix influentes se sont élevées pour pointer du doigt la faillite du système. Le chanteur Lokua Kanza, fort de plus de trois décennies de carrière internationale, a révélé n’avoir jamais perçu le moindre centime de ses droits en RDC. D’autres, comme Samarino, se sont publiquement moqués de sommes dérisoires reçues pour des œuvres diffusées à grande échelle. Le musicien Werrason, quant à lui, a mis en cause des luttes de pouvoir internes et un bicéphalisme chronique paralysant la structure.
L’indignation dépasse le cercle des artistes de renom. Dans les provinces, des créateurs vivent une situation tout aussi frustrante. Au Sud-Kivu, plusieurs artistes locaux ont exprimé leur colère à travers des pétitions dénonçant l’inaction de la SOCODA. L’humoriste Fred Kabeya, notamment, fustige une gestion obsolète et opaque, où les œuvres sont utilisées sans la moindre compensation pour leurs auteurs.
Ce malaise est également confirmé en interne. Une source proche du dossier, qui a requis l’anonymat, souligne que de nombreux utilisateurs d’œuvres protégées — chaînes de télévision, établissements hôteliers, bars — ne s’acquittent tout simplement pas de leurs obligations. Cette insolvabilité généralisée compromet toute redistribution équitable des droits aux artistes.
Dans ce contexte tendu, certaines figures intellectuelles appellent à un changement profond. L’écrivain et juriste Hervé Michel Buetusiwa, plus connu sous le nom de Tata N’longi, a récemment publié un message incisif sur ses réseaux sociaux. Il y dénonce un « système né dans le désordre » et appelle à « balayer les structures actuelles », plaidant pour une réforme structurelle incluant la création de plusieurs organismes spécialisés selon les secteurs culturels.
La question centrale demeure : pourquoi une institution censée défendre les intérêts des créateurs peine-t-elle autant à remplir sa mission ? Alors que les artistes congolais, souvent dans des conditions précaires, continuent de nourrir l’âme du pays à travers leur art, l’attente d’une gestion plus juste, transparente et efficace de leurs droits se fait de plus en plus pressante.
À l’heure où la RDC aspire à valoriser son patrimoine culturel et à encourager l’émergence d’une industrie créative dynamique, la réorganisation de la SOCODA apparaît non seulement comme une nécessité, mais comme une urgence.